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Axe de recherche 6

Le droit coopératif

Responsables de l’axe de recherche : Ifigeneia Douvitsa (membre, Comité sur le droit coopératif de l'ACI), Santosh Kumar (Directeur de la législation, ACI), Hagen Henrÿ (membre, Comité sur le droit coopératif de l'ACI CLC)

Comité de l’axe de recherche : Ifigeneia Douvitsa (membre, Comité sur le droit coopératif de l'ACI), Santosh Kumar (Directeur de la législation, ACI), Hagen Henrÿ (membre, Comité sur le droit coopératif de l'ACI CLC), David Hiez (Président, Ius Cooperativum)

Description :

En 2025, le monde célébrera la deuxième Année internationale des coopératives (AIC) en l'espace de 13 ans seulement. Les résolutions respectives des Nations unies (Doc. A/RES/64/136 et Doc. A/C.3/78/L.11) appelle/a appelé les gouvernements à conformer leur droit coopératif à la déclaration de 1995 de l'Alliance coopérative internationale sur l'identité coopérative (Déclaration de l'ACI). Le contenu de la Déclaration de l'ACI, une définition des coopératives, des valeurs et des principes, est désigné ci-après comme « les principes coopératifs ». Ces résolutions résument les instruments précédents des organisations internationales qui entrent dans les moindres détails en ce qui concerne le droit coopératif. Pour ne citer que le projet de lignes directrices des Nations Unies de 2001 visant à créer un environnement favorable au développement des coopératives, la recommandation sur la promotion des coopératives de 2002 [n° 193] de l'Organisation internationale du travail (OIT R. 193) et le rapport du Secrétaire général des Nations Unies de 2021 sur « Les coopératives dans le développement social ».

Si ces appels répétés aux gouvernements - quatre fois en moins de 25 ans - indiquent des lacunes persistantes, cette période a également vu l'inclusion des principes coopératifs en totalité, en partie, avec des modifications ou par référence dans les lois uniformes régionales sur les coopératives (OHADA Droit des sociétés coopératives; Projet de loi sur les sociétés coopératives de la Communauté d'Afrique de l'Est; Règlement du Conseil de l'Union européenne (EC) No 1435/2003 sur le statut de la société coopérative européenne (SCE), modèles de lois régionales sur les coopératives (Loi-cadre de l'ACI pour les coopératives en Amérique latine ; loi de l'Union africaine sur les coopératives en Afrique), ainsi que dans de nombreuses lois nationales sur les coopératives.

Dans ce contexte, l’axe de recherche sur le droit coopératif abordera trois domaines interdépendants, deux se rapportant plutôt à notre situation actuelle, le troisième à ce que nous pourrions avoir à faire, à savoir : le droit international public et le droit coopératif; les réformes du droit coopératif depuis l'adoption de la R. 193 de l'OIT et en particulier entre la première et la deuxième AIC (2012-2025); et le droit coopératif futur.

En ce qui concerne le premier domaine, les contributions pourraient établir s'il existe ou non un droit international public de la coopération et de quelle manière il oriente les législateurs et législatrices vers la traduction des principes coopératifs. Les instruments internationaux susmentionnés, en particulier lorsqu’ils sont lus dans le contexte des deux Pactes relatifs aux droits de l’homme (ICCPR et CESCR), le concept juridique du développement durable et les statuts de l'ACI, ainsi que l'inclusion mentionnée des principes coopératifs dans les lois régionales et nationales sur les coopératives, pourraient constituer une ou plusieurs sources de droit international public conformément à l'article 38 du statut de la Cour internationale de justice.

En ce qui concerne le deuxième domaine, les contributions doivent faire le point sur ce qui a été réalisé et sur ce qui reste à faire en termes traduction juridique des principes coopératifs.

En ce qui concerne le troisième domaine, les contributions doivent suggérer des solutions législatives aux changements dans le monde des entreprises, dont les coopératives font partie. En effet, le monde des entreprises subit des changements radicaux, principalement causés par les facteurs de la mondialisation, à savoir la numérisation, la digitalisation et les moyens techniques de transférer des données quasi instantanément. Ces changements affectent la structure des coopératives et la perception du rôle social et sociétal que les entreprises devraient jouer. La structure des coopératives est devenue/devient plus complexe en ce qui concerne la notion de membres, les activités et les bénéficiaires de ces activités. En outre, les nouvelles structures coopératives mélangent des acteurs et actrices et des intérêts privés et publics, ainsi que des approches non commerciales et commerciales, et elles fusionnent les figures de la personne productrice, distributrice et consommatrice. Alors que les facteurs de mondialisation ouvrent des possibilités jusqu'ici sous-utilisées pour matérialiser la participation démocratique des membres, qui est un méta-principe dans toutes les parties de la Déclaration de l'ACI, ils provoquent ou permettent également aux entreprises de tous types de muter du statut d'entités permanentes singulières qui relient leurs opérations au moyen de de contrats avec d’autres entités pour devenir des éléments organisationnels de chaînes de valeur mondiales verticales et horizontales plus ou moins permanentes. Des éléments des chaînes de valeur ou des chaînes de valeur entières se dissolvent dans des réseaux d'acteurs mondiaux éphémères et amorphes. Ils passent du statut de collectifs à celui de connecteurs. Les chaînes de valeur sont composées de différents types d'entreprises soumises à des législations nationales et/ou régionales différentes. Jusqu'à présent, les chaînes de valeur elles-mêmes ne sont soumises à aucune loi, mais sont souvent réglementées par les clauses contractuelles générales imposées par les dirigeants de la chaîne. Il semble que les réseaux d'acteurs et d’actrices ne puissent pas être réglementés par la loi, mais qu'ils soient de plus en plus réglementés par des algorithmes dont les auteur.e.s sont soit anonymes, soit non tangibles.

Il est difficile de savoir comment le méta-principe de la participation démocratique des membres peut se matérialiser par le droit coopératif dans ces nouveaux types de coopératives, dans de telles chaînes de valeur et réseaux. Mais si nous considérons ce méta-principe comme la caractéristique distinctive qui continue à différencier les coopératives des autres formes d'entreprises au-delà de ce qui est exigé par la Responsabilité Sociale des Entreprises (RSE) et des acteurs et actrices de l'économie sociale et solidaire, alors le droit coopératif devra s'adapter à ces changements afin de permettre et d'habiliter les coopératives à rester économiquement, socialement et culturellement pertinentes pour leurs membres et les communautés dans lesquelles elles agissent, comme l'exigent leur définition et le 7ième principe de l'ACI.

En même temps, ces changements nécessitent d'examiner la notion de droit coopératif dans au moins six directions : premièrement, le champ d'application du droit coopératif ne peut se limiter à la loi sur les coopératives, mais il doit comprendre tout autre principe, règle ou pratique juridique qui affecte l'organisation des coopératives; deuxièmement, la notion individualiste du droit telle qu'elle domine actuellement le discours juridique pourrait ne pas servir de véhicule pour l'expression de l'élément central des coopératives, à savoir la solidarité; troisièmement, à la lumière de la « désorganisation » des entreprises (de collectives à connectives), la notion actuelle de droit coopératif pourrait ne pas servir de véhicule pour l'expression de la solidarité; troisièmement, à la lumière de la « désorganisation » des entreprises (des collectifs aux connectifs), la notion actuelle de droit coopératif en tant que droit organisationnel pourrait être complétée par une notion qui institutionnalise l'idée des coopératives sans nécessairement l'organiser; quatrièmement, étant donné que les facteurs de la mondialisation réduisent la portée des lois nationales et, par extension, celle des lois régionales et internationales, et que la responsabilité sociale et sociétale des entreprises augmente, comme l'exprime la notion de partie prenante, et qu'elle se juridicise, notamment en raison des exigences du concept juridique de développement durable, d'autres lois que les lois nationales, telles que, par exemple, le droit religieux, le droit coutumier, les normes établies par les acteurs privés, le droit des secteurs informels, doivent être prises en compte; cinquièmement, différentes lois se rencontrent de plus en plus fréquemment et doivent être articulées, par exemple dans les coopératives où les membres ne partagent pas la même culture et où les coopératives s'intègrent de manière organisationnelle dans les chaînes de valeur mondiales. Articuler ces différentes lois, c'est prendre au sérieux la place centrale de la personne dans les coopératives, c'est améliorer la mise en œuvre du droit coopératif et c'est permettre de « construire » la justice sociale. La justice sociale est l'aspect central du développement durable. Elle ne peut être autre chose qu'un tissu de perceptions différentes de la justice sociale dont toutes les lois dans une situation spécifique sont l'expression la plus adéquate; et, sixièmement, comme l'indiquent les cinq directions précédentes, la notion de droit doit être à la fois un composite et un catalyseur de l'existence de lois différentes et diversifiées.

Contributions

Sans exclure d'autres thèmes, les responsables de cet axe de recherche suggèrent les thèmes suivants liés aux principes coopératifs et au droit coopératif tels que définis dans la description :

  • Le droit coopératif régional et national et droit international public;

  • Le droit coopératif régional et national et le concept juridique du développement durable;

  • l’élaboration de la législation sur les coopératives et implémentation de celle-ci;

  • Les réformes du droit coopératif depuis l'adoption de la R. 193 de l'OIT et en particulier au cours de la période entre la première et la deuxième AIC;

  • Le droit coopératif et nouveaux types de coopératives;

  • Le droit coopératif, coopération entre coopératives selon le 6ième principe de l'ACI, chaînes de valeur et réseaux;

  • Le droit coopératif et algorithmes;

  • Le droit coopératif et le concept/principe/but/objectif juridique du développement durable;

  • Le droit coopératif et normes de déclaration en matière de développement durable;

  • Le droit coopératif et les lois sur l'économie sociale et/ou solidaire;

  • Le droit coopératif, droit comparé et notion de droit.

Références :

  • the 1966 International Covenant on Civil and Political Rights (ICCPR);

  • the 1966 International Covenant on Economic, Social and Cultural Rights (CESCR);

  • the 1995 International Cooperative Alliance Statement on the co-operative identity (International Co-operative Review, Vol. 88, no. 4/1995, 85 f.; http://ica.coop/en/whats-co-op/co-operative-identity-values-principles);

  • the 2001 United Nations Draft guidelines aimed at creating a supportive environment for the development of cooperatives (Annex to the 2001 Report of the Secretary-General of the United Nations on “Cooperatives in social development”, Doc. A/56/73-E/2001/68);

  • the Promotion of Cooperatives Recommendation, 2002 [No. 193], of the International Labor Organization (www.ilo.org/dyn/normlex/en/f?p=NORMLEXPUB:12100:0::NO::P12100_ILO_CODE:R193);

  • the 2021 Report of the Secretary-General of the United Nations on “Cooperatives in social development” (Doc. A/76/209);

  • ICA Articles of Association (Article 12.1 in connection with the Appendix ’A’). (https://www.ica.coop/en/about-us/our-structure/alliance-rules-and-laws)

  • Concerning the legal concept/principle/goal/objective of sustainable development, see

    • Case Gabcikovo-Nagymaros Project (Hungary/Slovakia), Judgment. I.C.J. Reports 1997, Paragraph 140;

    • Pulp Mills on the River Uruguay (Argentina v. Uruguay), Judgment, ICJ Reports (2010) 14 at Paragraph 177;

    • Indus Waters Kishenganga (Pakistan v. India), Partial award 2013, at Paragraph 450.

    • As for sustainable development being a legal principle, see also Voigt, C., Sustainable Development as a Principle of International Law: Resolving Conflicts between Climate Measures and WTO Law, Nijhoff 2008.